jeudi 22 janvier 2009, par Renée Prangé et Laurent Pallier
Les orages magnétiques et les cycles des taches solaires semblent subtilement liés. Les grands orages apparaissent le plus souvent pendant les années de forte activité des taches solaires. Kristian Birkeland, physicien norvégien, fit une expérience en 1895, en s’inspirant de Gilbert, il prit une sphère magnétisée qu’il nomma "terrella", la plaça dans une chambre à vide faite en verre. Il bombarda cette terrella par un faisceau d’électrons et observa leur passage par la décharge que ces électrons produisaient dans l’air résiduel resté dans la chambre à vide. La décharge suivait les lignes du champ magnétique (lignes de force) et convergeait près des pôles magnétiques de la terrella.
Est-ce une preuve que les aurores polaires se produisent à distance limitée (càd aux hautes latitudes) autour des pôles magnétiques ?
C’était, en effet, bien exact. Le mathématicien français Henri Poincaré, et 50 ans plus tard, avec plus de détails le suédois Hannes Alfvén analysèrent le mouvement de ces électrons, et conclurent qu’ils étaient guidés par des lignes de champ magnétique, comme des perles sont enfilées sur un fil. De son expérience avec la terrella, Birkeland avait deviné que l’aurore était causée par des électrons en provenance du Soleil, guidés par les lignes du champ magnétique vers les pôles terrestres. Ces électrons produisaient alors une décharge, lorsqu’ils atteignaient la haute atmosphère. En fait il s’avèra que tout était bien pensé sauf que le soleil n’était pas la source des électrons.
Tromsœ, 70 degrés de latitude, se trouve exactement au centre de la zone polaire la plus active en matière d’aurores boréales. Son Institut de physique est tout naturellement devenu le centre mondial pour la coordination des recherches sur ce phénomène lumineux typique des régions proches des cercles polaires. L’Université de Tromsœ a voulu rendre hommage au professeur norvégien Olaf Bernhard Birkeland (1867-1917) qui fut le premier à prouver l’origine des aurores boréales. Ses techniciens ont restauré et rendu opérationnelle la boîte expérimentale avec laquelle Birkeland obtint, il y a exactement cent ans, ses résultats décisifs.
Une boîte de verre de 2 mètres de côté repose sur un chevalet en bois dans un recoin du laboratoire des plasmas de l’Uni de Tromsœ. C’est Terrella, dans sa version originale, soit l’appareil conçu et ainsi nommé par Birkeland pour simuler un Univers artificiel. Dans l’enceinte vide d’air est suspendue une boule (la Terre) magnétisée et recouverte d’un matériel fluorescent. Dans un angle de l’enceinte est disposé un émetteur d’énergie (le Soleil) relié par des électrodes à une machine à injecter du courant.
L’ingénieur Brundtland actionne les boutons : les particules solaires – électrons et protons – sont bombardées contre la Terre ; le flot continu d’énergie achoppe contre le bouclier que constitue le champ magnétique, et il contourne la Terre pour se faufiler vers les deux pôles d’où partent les boucles du champ magnétique. Les particules produisent une débauche d’énergie : ainsi naissent simultanément deux aurores polaires, une au nord (dite boréale) et l’autre au sud (dite australe), bien visibles à travers les vitres de la boîte du professeur.