mardi 25 avril 2017, par Claude Catala, Kevin Belkacem
La mission PLATO (PLAnetary Transits and Oscillation of stars) a été sélectionnée le 19 février par le Comité du Programme Scientifique de l’ESA dans le cadre de son programme Cosmic Vision pour un lancement prévu en 2024. Ce télescope spatial permettra de découvrir et caractériser des systèmes planétaires comparable au système solaire.
Il s’agit d’un instrument doté de 34 télescopes avec un très large champ permettant d’observer un très grand nombre d’étoiles brillantes. L’objectif scientifique de la mission est de détecter, grâce à la méthode des transits planétaires, des planètes rocheuses dans la zone habitable et – simultanément – de déterminer, grâce à la sismologie, les caractéristiques des étoiles hôtes de planètes. Ceci est important pour faire progresser notre connaissance de la formation et de l’évolution des systèmes planétaires. Cette mission bénéficiera également d’une très forte synergie avec la mission GAIA ainsi qu’un suivi spectroscopique depuis le sol. En particulier, PLATO fournira les masses, rayons, et âges des étoiles et planètes avec une précision sans précédent.
Etoiles et planètes naissent ensemble à partir du même milieu, et donc partagent les premières phases de leur histoire. Leur formation et leur évolution restent ensuite intimement liées. L’évolution des systèmes planétaires doit donc être considérée comme un tout, et la compréhension de l’évolution des planètes passe par celle de l’évolution stellaire.
De plus, la caractérisation des exoplanètes (mesure de leurs paramètres orbitaux, de leur taille, de leur masse, de leur âge) nécessite celle de leurs étoiles-hôtes. En effet, la plupart des mesures que nous pouvons obtenir sur les systèmes exoplanétaires concernent les rapports des quantités décrivant la planète à celles décrivant l’étoile : rapport des rayons planète/étoile, rapport des masses, etc.
L’approche proposée pour la mission PLATO est précisément d’étudier simultanément les exoplanètes et leurs étoiles-hôtes, observées ensemble par la même technique.
La photométrie à ultra-haute précision, telle qu’utilisée dans le cadre de la mission CoRoT, permet de détecter le transit des exoplanètes devant leur étoile-hôte, selon le schéma ci-dessous :
(cliquez pour agrandir)
La méthode photométrique est pour l’instant la seule permettant de mesurer le rapport des rayons de la planète et de l’étoile, en mesurant la profondeur du transit sur la courbe de lumière. Elle nous donne également la possibilité de détecter de petites planètes telluriques.
L’astérosismogie est l’étude des oscillations stellaires, qui sont des ondes acoustiques se propageant à l’intérieur des étoiles. Les fréquences de ces oscillations dépendent de la structure de l’intérieur des étoiles, donc leur mesure nous permet de sonder directement les intérieurs stellaires. C’est ainsi que l’analyse fine des fréquences d’oscillation d’une étoile nous permet de mesurer précisément sa masse, son âge, sa rotation interne, ainsi que d’autres détails de sa structure interne.
On y voit à la fois le comportement de l’oscillation en surface, représenté par une harmonique sphérique, ainsi que le comportement à l’intérieur de l’étoile, dans la portion en coupe (cliquez pour agrandir)
Cet outil nous permettra de mesurer les caractéristiques des étoiles-hôtes des exoplanètes détectées par PLATO, et d’en déduire celles des planètes, en particulier leur âge.
L’astérosismologie sera également utilisée par PLATO pour progresser dans notre compréhension de l’évolution stellaire.
"Le satellite PLATO observera deux champs de 2150 deg2, chacun pendant 2 ou 3 ans. Un troisième champ pourra être ajouté en fin de mission. Ainsi, des exoplanètes de période orbitale jusqu’à 1 an pourront être détectées. A ces phases d’observations longues, s’ajoutera une phase dite de "step&stare", pendant laquelle plusieurs champs de 2150 deg2 seront observés plusieurs mois chacun. Au total, c’est pratiquement la moitié du ciel qui pourra être couverte par des observations de PLATO. Environ 1 million d’étoiles naines froides seront scrutées à la recherche de planètes, parmi lesquelles les 85000 les plus brillantes seront mesurées avec une précision suffisante pour détecter et analyser leurs oscillations. Ces exoplanètes dont l’étoile-hôte sera analysée par sismologie, pourront être caractérisées : en particulier nous connaîtrons de manière fiable leur taille, leur masse et leur âge.
Le concept instrumental de PLATO consiste en un ensemble de 32 caméras identiques, entièrement dioptriques, de 120mm de pupille, observant le même champ de 38.5° de diamètre à la cadence d’une image toutes les 25 secondes. Deux caméras supplémentaires observeront un champ plus petit, mais à la cadence de 2,5 secondes, et seront dédiées à la mesure des étoiles les plus brillantes du champ. Chacune de ces caméras est équipée de son propre plan focal, constitué de 4 CCDs de 4510 x 4510 pixels. Les images de chacune de ces caméras sont traitées à bord et les courbes de lumière et de barycentres de toutes les étoiles présentes dans le champ sont mesurées et transmises au sol, indépendamment pour chaque caméra, avant d’être moyennées.
Concept instrumental étudié dans le cadre de la mission PLATO. Le concept montré ci-dessus inclut 40 caméras identiques, tandis que le concept retenu actuellement n’en compte que 32.
Un élément important de PLATO sera l’organisation d’observations de suivi au sol. En particulier, la mesure des vitesses radiales des étoiles pour lesquelles des transits auront été détectés permettra d’une part de confirmer la présence des planètes et d’autre part de mesurer leur masse.
Par ailleurs, pour les exoplanètes détectées autour des étoiles les plus proches et les plus brillantes, des observations avec d’autres instruments, comme l’E-ELT ou bien le télescope spatial JWST, permettront une étude des atmosphères planétaires.
PLATO sera injecté sur une orbite autour du point de Lagrange L2, par un lanceur Soyouz-Frégate. La stabilité de cette orbite lui permettra d’observer sans interruption (ou presque) le même champ pendant plusieurs années, moyennant une rotation du satellite autour de la ligne de visée tous les 3 mois.
PLATO sera placé en orbite autour du point de Lagrange L2, situé à 1,5 millions de km de la Terre dans la direction opposée au Soleil (cliquez pour agrandir)
Le champ surveillé par PLATO sera au final de plus de 20000 deg2, soit environ la moitié du ciel, dont 4300 deg2 suivis continûment sur plusieurs années, à comparer aux 6 fois 4 deg2 de CoRoT. Par ailleurs, dans son concept à 32 caméras, PLATO offrira une surface collectrice de 0.4 m2, significativement plus grande que les 0.06 m2 de CoRoT. Ainsi, les oscillations de type solaire seront détectables jusqu’à la magnitude 11, alors que CoRoT ne peut les détecter que jusqu’à la magnitude 8 environ.
L’implication du LESIA dans la préparation de la mission PLATO est triple, à savoir :
– Contributions à la réalisation de l’instrument
Au niveau de l’instrument, le LESIA fournit le logiciel vol des voies N DPU.
– Contributions au centre de mission (PDC)
Au sein du PLATO Data Center (PDC), l’équipe SEISM du LESIA dirige et coordonne le groupe de travail nommé "Data Processing Algorithm" (WP32) qui a en charge l’étude et la spécification détaillée de l’ensemble des traitements bord et sol de la mission PLATO. Ce groupe rassemble du personnel chercheur et ingénieur du LESIA ainsi que de nombreux collaborateurs étrangers (Portugal, Brésil, Allemagne, Angleterre). Le LESIA est également impliqué dans le développement et la validation de la chaîne de traitement sol des courbes de lumières (et imagettes) qui seront acquises à bord. Cette chaîne sera ensuite intégrée par l’ESA dans son centre de mission.
– Contributions au Science Preparation Management (PSPM)
Le LESIA a la responsabilité de l’étude et des spécifications détaillées des procédures de caractérisation des étoiles hôtes : détermination des masses, rayons, âges, rotation, activité stellaire etc… Il est en charge aussi des spécifications et la construction des grilles de modèles stellaires.