mardi 27 juillet 2010, par Pierre Drossart, Stéphane Erard
La mission Galileo (1990-2003) avait pour objectif l’étude détaillée de Jupiter et de son environnement (satellites, anneaux, magnétosphère). Elle portait le premier spectro-imageur spatialisé, NIMS.
Les observations de l’atmosphère de Jupiter effectuées en orbite par la sonde Galileo ont donné une vision détaillée des phénomènes atmosphériques principaux, et ont étendu les observations réalisées en 1995 par le module de descente de la mission. Les études menées au LESIA ont concerné principalement la structure de l’atmosphère et sa teneur en eau, la structure nuageuse et les émissions aurorales. La mission Galileo s’est terminée en septembre 2003, avec la plongée volontaire de la sonde dans l’atmosphère de Jupiter — afin d’éviter que, transformée en épave après l’épuisement de son carburant, elle ne s’écrase un jour sur le satellite Europe qu’elle aurait pu contaminer.
Célèbre pour les ennuis techniques qui ont émaillé sa mission (panne d’antenne, de stockage de masse, d’ordinateur, etc.), mais qui furent tous surmontés, la sonde Galileo restera aussi dans la longue liste des missions spatiales de la NASA comme celle des grandes premières :
L’expérience NIMS (spectro-imagerie infrarouge 0,7-5,2 µm) est la toute première expérience de spectro-imagerie embarquée sur une sonde spatiale, avec pour objectifs l’étude de l’atmosphère jovienne et des satellites de glace. NIMS est entré en phase opérationnelle en juin 1996. Les 11 orbites de la mission nominale ont été mises à profit pour étudier les objectifs suivants, conformes aux plans initiaux :
Les premières images spectrales à 5 µm par NIMS dans un point chaud de Jupiter étaient compatibles avec les mesures de la structure atmosphérique et nuageuse de Jupiter telle que mesurée par le module de descente. Les observations de la vapeur d’eau (analysées dans la thèse de doctorat de M. Roos-Sérote) montraient une grande variabilité de l’abondance de l’eau au voisinage des points chauds de Jupiter, par ailleurs des structures extrêmement sèches, en accord avec les mesures du module de descente. On observe une bonne corrélation entre l’abondance de l’eau et l’opacité nuageuse, indiquant que les régions les plus chaudes sont aussi les plus sèches. Ce résultat, attendu, n’avait jamais pu être obtenu à une résolution spatiale aussi élevée que celle de l’instrument NIMS (300 km environ). D’autre part, les observations corrélées de NIMS et de la caméra SSI ont permis la mise en évidence de variations locales importantes de l’eau, liée à des nuages d’orage observés en visible, qui mettent en évidence pour la première fois l’importance de la convection humide dans Jupiter.
Par la suite, l’effort a porté sur les zones d’anomalie d’humidité, suite à l’étude au voisinage des points chauds. L’interprétation des données de NIMS a été favorisée par les données d’ISO obtenues au même moment, qui constituent une base de données très complémentaires de celles de NIMS (haute résolution spectrale contre observations in situ).
Les observations des aurores polaires de Jupiter avec NIMS ont permis une localisation précise de ces émissions, en même temps que la mesure de la température de l’ionosphère, grâce à la structure d’émission de l’ion H3+.
En ce qui concerne la structure nuageuse, la combinaison des observations NIMS et ISO, à 2,7-3 µm a permis de mettre en évidence des contraintes sur l’absorption du nuage supérieur, absorbant à ces longueurs d’onde. En particulier, une absorption due probablement à la glace de NH3 a été mise en évidence dans le spectre ISO. Les observations de la variabilité spatiale de cette absorption permettent, dans les spectres NIMS, d’étudier la variabilité de la structure verticale nuageuse, en particulier dans la grande tache rouge. Après la mise en évidence de l’émission thermique des nuages d’ammoniac sur la face nocturne de Jupiter, les données NIMS ont été analysées pour rechercher des signatures de nuages particuliers.
Enfin, NIMS a permis d’autres découvertes importantes avec les cibles observées en cours de croisière :
Le LESIA était impliqué dans l’expérience NIMS par le biais de co-investigateurs scientifiques, le P.I. de NIMS étant R.W. Carlson (NASA/JPL). Les collaborations sur les sujets atmosphériques ont concerné, outre le JPL, l’université d’Oxford (F.W. Taylor). De plus, la collaboration s’est poursuivie avec Maarten Roos-Serote, chercheur à l’Observatoire de Lisbonne, qui a été formé à Meudon lors de sa thèse sur les données NIMS/Galileo.
P. Drossart, T. Encrenaz, E. Lellouch, B. Bézard, Th. Fouchet, M. Roos-Serote, J. Rosenqvist (décédé en 1995).
Maarten Roos-Serote | Spectro-imagerie de Vénus et Jupiter : Interpretation des observations Galileo/NIMS (1997) |