mardi 3 octobre 2023
La détection de sursauts radio est un moyen puissant d’étudier à distance les processus d’accélération des électrons dans les plasmas astrophysiques. On sait par exemple depuis 50 ans que de tels sursauts sont produits par l’interaction entre la magnétosphère de Jupiter et son satellite Io. Les résultats de deux articles récents impliquant une doctorante du LESIA et son équipe illustrent comment les études des émissions radio de Jupiter peuvent se transposer aux systèmes stellaires.
Grâce à un nouvel algorithme informatique appliqué aux observations du « Réseau Décamétrique de Nançay » (un radiotélescope sur très basses fréquences), les chercheurs ont pu détecter des impulsions radio produites en association avec les aurores polaires de Jupiter et l’interaction du satellite Ganymède avec le champ magnétique de Jupiter, donc similaires aux sursauts radio produits par Jupiter et Io. On pense que ces impulsions radio révèlent la manière dont les électrons qui les produisent sont accélérés.
En parallèle, des observations récentes du radiotélescope géant chinois FAST ont permis de découvrir des impulsions radio similaires provenant de l’étoile éruptive AD Leonis, 100 à 1000 fois plus intenses que celles de Jupiter. On peut comprendre et expliquer ces phénomènes, qui semblent assez universels, en s’inspirant du modèle théorique construit pour les impulsions radio de Jupiter, dans lequel le mouvement de Io, de Ganymède ou du plasma magnétosphérique à travers le champ magnétique de Jupiter fait intervenir des oscillations magnétiques appelées « ondes d’Alfvén ».
Ces deux articles sont un premier exemple de la manière dont les mécanismes et scenarii physiques élaborés pour un objet du Système solaire peuvent être extrapolés et transposés à des sources astrophysiques plus lointaines et inaccessibles.
Légende de l’illustration :
(a) Le radiotélescope décamétrique de Nançay.
(b) Les impulsions radio de Jupiter, qui glissent des hautes vers les basses fréquences
(c) Jupiter, son champ magnétique, ses aurores, le satellite Ganymède : la flèche jaune représente le mouvement des électrons accélérés qui produisent les impulsions radio.
(d) Le radiotélescope chinois FAST.
(e) Les impulsions radio de l’étoile AD Leonis, qui glissent des basses vers les hautes fréquences
(f) Une vue d’artiste d’AD Leonis, son champ magnétique, ses aurores : la flèche jaune représente le mouvement des électrons accélérés qui produisent les impulsions radio.
Sources et copyrights :
(a) Réseau Décamétrique de Nançay (NDA, © ORN).
(b) Observation NDA/Juno-N fournie par L. Lamy.
(c) Schéma adapté de la Fig. 3 de Szalay et al., Geophys. Res. Lett. 49, e2022GL098111, 2022, https://doi.org/10.1029/2022GL098111.
(d) https://apod.nasa.gov/apod/image/1609/DaiFAST_1500.jpg.
(e) Figure adaptée de la Fig. 1 de [2].
(f) Vue d’artiste d’une étoile naine (© ASTRON/Danielle Futselaar).
[1] Emilie Mauduit, Philippe Zarka, Laurent Lamy, & Sébastien Hess, Drifting discrete Jovian radio bursts reveal acceleration processes related to Ganymede and the main aurora, Nature Communications, sous presse.
[2] Jiale Zhang, Hui Tian, Philippe Zarka, Corentin Louis, Hongpeng Lu, Dongyang Gao, Xiaohui Sun, Sijie Yu, Bin Chen, Xin Cheng, & Ke Wang, Fine structures of radio bursts from flare star AD Leo with FAST observations, The Astrophysical Journal, 953 :65, 2023. https://doi.org/10.3847/1538-4357/acdb77
Emilie Mauduit, Philippe Zarka, Laurent Lamy, Corentin Louis sont membres du LESIA.