vendredi 18 décembre 2020
Grâce au radiotélescope européen Low Frequency Array (LOFAR), une équipe internationale impliquant des chercheurs de l’Observatoire de Paris–PSL, du CNRS et de l’Université d’Orléans détecte ce qui pourrait être la signature de la première émission radio d’une planète extrasolaire. Ces travaux paraissent en ligne sur le site de la revue Astronomy & Astrophysics, le 16 décembre 2020.
Le radiotélescope européen LOFAR, l’un des plus grands au monde, observe de la lumière de très basse énergie, invisible à l’oeil humain et à tout télescope optique. Il a la particularité d’opérer à très basses fréquences (entre 10 et 250 mégahertz) dans un domaine d’énergie essentiellement inexploré. Exploité par ASTRON aux Pays-Bas et chez ses voisins européens, notamment en France, il consiste en un réseau de cinquante mille antennes réparties en Europe. La partie française du réseau est implantée à Nançay, dans le Cher, au sein de la station de radioastronomie de l’Observatoire de Paris - PSL (Observatoire de Paris - PSL / CNRS / Université d’Orléans).
À l’aide de LOFAR, une équipe internationale a ainsi détecté des ondes radio émanant de la constellation boréale du Bouvier, une région du ciel dominée par l’étoile Arcturus, à 50 années-lumière. Ce signal pourrait être la première émission radio provenant d’une planète située au-delà de notre Système solaire. Il provint du système τ Boötes qui contient une étoile binaire et une exoplanète géante gazeuse très proche de son étoile (un “Jupiter chaud”), baptisée τ Boötes b, que la théorie prédit être un bon candidat à la production d’ondes radio intenses.
L’intensité et la polarisation du signal plaident en faveur d’une émission provenant de cette exoplanète.
L’an dernier, l’équipe scientifique avait utilisé LOFAR pour observer Jupiter. Son signal radio très atténué, mis à l’échelle d’une exoplanète située à quelques dizaines d’années-lumière, a servi de “patron” pour la recherche d’émissions radio d’exoplanètes.
L’analyse d’une centaine d’heures d’observations a révélé la signature attendue dans les données de τ Boötes. Cette signature est faible, et l’origine planétaire du signal encore incertaine, donc le besoin d’observations de suivi est crucial.
La détection d’une telle émission radio permet de sonder le champ magnétique, donc l’intérieur d’une exoplanète, ainsi que la physique des interactions étoile - planète. Le champ magnétique, protégeant la planète des radiations du vent stellaire, pourrait favoriser l’habitabilité.
L’observation d’autres “Jupiters chauds” dans les systèmes 55 Cancri et Ups. Andromedae n’a pas révélé d’émission comparable.
Les auteurs ont déjà entamé une nouvelle campagne de suivi de τ Boötes utilisant plusieurs radiotélescopes basses fréquences, dont le dernier né, NenuFAR, à la station de radioastronomie de Nançay.
Crédit : S. Cnudde / Observatoire de Paris – PSL / LESIA / USN
L’information parue sur Cornell Chronicle, le site de l’Université de Cornell (E.-U.) : https://news.cornell.edu/