lundi 21 septembre 2009
(mise à jour le 29 septembre 2009)
Une équipe internationale d’astronomes [A], parmi lesquels des chercheurs du LESIA de l’Observatoire de Paris, ont mesuré la masse et la densité de la plus petite exoplanète à ce jour. Cette plus petite exoplanète connue est rocheuse ! Le plus long cycle d’observation d’une étoile jamais réalisé avec l’instrument HARPS a permis de confirmer la nature de l’exoplanète CoRoT-7b en dévoilant sa masse, équivalente à cinq fois celle de la Terre. Cette exoplanète accumule les records : elle est la plus petite exoplanète connue et a également la vitesse orbitale la plus élevée... mais c’est aussi et surtout la première exoplanète rocheuse confirmée. La grande quantité de données recueillies a également permis de mettre en évidence la présence d’une seconde planète extrasolaire de type "super-terre".
L’exoplanète CoRoT-7b est si proche de son étoile, une étoile similaire au Soleil, qu’elle doit subir des conditions extrêmes. La masse de cette planète est de 5 masses terrestres et est en fait l’exoplanète connue la plus proche de son étoile, ce qui en fait aussi la plus rapide. Elle tourne autour de son étoile à une vitesse supérieure à 750 000 Km/h. La température probable de sa face éclairée doit être supérieure à 2000 degrés alors que sa face nocturne serait à -200 degrés. Les modèles théoriques laissent supposer que sa surface est composée en partie de lave liquide. L’artiste a ici réalisé une représentation de ce que devrait être la surface de cette planète si elle est couverte de lave. La "planète soeur" CoRoT-7c est vue au loin. Crédit : ESO/L. Calçada.
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"C’est la science dans ses aspects les plus stupéfiants et les plus passionnants" déclare Didier Queloz, le responsable de l’équipe qui a réalisé cette campagne d’observations. "Nous avons fait tout ce que nous pouvions pour comprendre à quoi ressemblait cet objet découvert par le satellite CoRoT et nous avons mis en évidence un système unique." En février 2009, la découverte par le satellite CoRoT d’une petite exoplanète autour d’une étoile plutôt banale appelée TYC 4799-1733-I était annoncée, un an après sa détection et après plusieurs mois de mesures très poussées avec de nombreux télescopes au sol, dont plusieurs de l’ESO. L’étoile, aujourd’hui appelée CoRoT-7 se situe du côté de la constellation de la Licorne, à environ 500 années-lumière de la Terre. Légèrement plus petite et plus froide que notre Soleil, CoRoT-7 est aussi supposée être plus jeune avec environ 1,5 milliards d’années. Toutes les 20,4 heures, la planète occulte l’étoile pendant un peu plus d’une heure [1]. La baisse de luminosité n’est que de 0,03 %. Cette planète appelée CoRoT-7b se trouve à seulement 2,5 millions de km de son étoile, soit 23 fois plus proche que Mercure ne l’est du Soleil. Son rayon est environ 80% plus grand que celui de la Terre.
Les premières mesures n’avaient pourtant pas permis de déterminer la masse de cette exoplanète. Un tel résultat nécessite des mesures extrêmement précises de la vitesse de l’étoile qui est soumise à la très faible attraction gravitationnelle de l’exoplanète. Le problème avec CoRoT-7b est que cet infime signal planétaire est perturbé par l’activité de son étoile -des tâches similaires aux tâches solaires. Ces tâches correspondent aux régions les plus froides de la surface de l’étoile. Ainsi, le signal principal est lié à la rotation de l’étoile qui fait une rotation complète en 23 jours. Aussi, pour percer le mystère de CoRoT-7b, les astronomes ont dû avoir recours au meilleur "chasseur de planète" au monde, HARPS (High Accuracy Radial Velocity Planet Search), un spectrographe installé au foyer du télescope de 3,60 mètres de l’Observatoire de La Silla au Chili. "Bien que HARPS soit certainement imbattable quant-il s’agit de détecter des exoplanètes de faible masse, les mesures de CoRoT-7b nécessitaient un tel niveau de précision que nous avons dû cumuler 70 heures d’observation de l’étoile". révèle François Bouchy, un des co-auteurs de l’article. Grâce aux données fournies par HARPS, les chercheurs ont pu "faire parler" ce signal récurrent toutes les 20,4 heures. D’après ces données, ils pensent que CoRoT-7b a une masse d’environ cinq fois celle de la Terre, la classant dans la catégorie des exoplanètes les plus légères actuellement découvertes.
"L’orbite de la planète étant aligné avec notre axe d’observation, nous pouvons la voir passer devant son étoile - c’est ce que l’on appelle un transit - et nous pouvons ainsi véritablement mesurer sa masse et pas simplement la déduire. En l’occurrence, c’est la plus petite masse jamais mesurée pour une exoplanète [2]" déclare Claire Moutou, membre de l’équipe. " De plus, comme nous connaissons à la fois le rayon et la masse, nous pouvons déterminer la densité et avoir ainsi une meilleure idée de la structure interne de cette planète ". Avec une masse bien plus proche de celle de la Terre que de celle d’une planète géante comme par exemple Neptune avec ses 17 masses terrestres, CoRoT-7b appartient à la catégorie d’exoplanètes dite des " super-Terres ". Une douzaine d’exoplanètes de cette catégorie a été détectée, mais dans le cas de CoRoT-7b, c’est la première fois que la densité a pu être déterminée pour une exoplanète de cette petite taille. La densité calculée est proche de celle de la Terre, ce qui laisse penser que cette planète est aussi composée de roche.
"Les mesures de CoRoT-7b représentent un véritable tour de force. La superbe courbe de lumière obtenue avec le satellite Corot nous a donné la meilleure mesure du rayon et HARPS, la meilleure mesure de la masse pour une exoplanète. Les deux mesures sont nécessaires pour découvrir une planète rocheuse ayant la même densité que la Terre" précise Artie Hatzes, un autre membre de l’équipe. CoRoT-7b remporte une autre distinction en étant l’exoplanète connue la plus proche de son étoile, ce qui en fait aussi la plus rapide. Elle orbite autour de son étoile à plus de 750 000 Km/h, soit plus de sept fois la vitesse orbitale de la Terre autour du Soleil. " En fait, CoRoT-7b est si proche de son étoile qu’elle doit ressembler à l’enfer de Dante, avec très probablement une température dépassant les 2000 degrés sur sa face éclairée et de -200 degrés du côté nuit. Les modèles théoriques laissent supposer que la surface de cette planète est recouverte de lave ou d’océans bouillonnants. Avec des conditions aussi extrêmes, il est absolument impensable que la vie se développe sur une telle planète " déclare Didier Queloz.
De plus, l’extrême précision de HARPS a également permis aux astronomes de déceler dans les données obtenues, la présence d’une autre planète plus éloignée que CoRoT-7b. Appelée CoRoT-7c, cette seconde planète tourne autour de son étoile en 3 jours et 17 heures et a une masse d’environ huit fois celle de la Terre. Elle rejoint donc également la catégorie des super-Terres. Contrairement à CoRoT-7b, on ne peut observer le transit de cette planète depuis la Terre, il n’est ainsi pas possible de déterminer son rayon et donc de calculer sa densité. Ses découvertes font de CoRoT-7 la première étoile connue hébergeant un système planétaire composé de deux super-Terres de courte période, avec dans le cas d’une des deux planètes, un transit observable.
Le vent stellaire est discernable à la surface de l’étoile active au premier plan. La planète CoRoT-7c peut être vue au loin. La planète CoRoT-7b est représentée de façon réaliste. Noter l’océan de lave liquide et la partie continentale de la face éclairée. L’hémisphère non éclairé, est recouvert probablement de dépôts de glace d’eau et de dioxyde de carbone. Des volcans et des cratères d’impact peuvent être remarqués sur la partie continentale. Crédit : CNRS/F. Catalano.
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[A] L’équipe est composée de :
D. Queloz, R. Alonso, C. Lovis, M. Mayor, F. Pepe, D. Segransan, and S. Udry (Observatoire de Genève, Switzerland), F. Bouchy, F. and G. Hebrard, G. (IAP, Paris, France), C. Moutou, M. Barbieri, P. Barge, M. Deleuil, L. Jorda, and A. Llebaria (Laboratoire d.Astrophysique de Marseille, France), A. Hatzes, D. Gandolfi, E. Guenther, M. Hartmann, and G. Wuchterl (Thüringer Landessternwarte Tautenburg, Germany), M. Auvergne, A. Baglin and D. Rouan (LESIA, CNRS, Observatoire de Paris-Meudon, France), W. Benz (University of Bern, Switzerland), P. Bordé, A. Léger and M. Ollivier (IAS, UMR 8617 CNRS, Université Paris-Sud, France), H. Deeg (Instituto de Astrofísica de Canarias, Spain), R. Dvorak (University of Vienna, Austria), A. Erikson and H. Rauer (DLR, Berlin, Germany), S. Ferraz Mello (IAG-Universidade de Sao Paulo, Brazil), M. Fridlund (European Space Agency, ESTEC, The Netherlands), M. Gillon and P. Magain (Université de Liège, Belgium), T. Guillot (Observatoire de la Côte d.Azur, CNRS UMR 6202, Nice France), H. Lammer (Austrian Academy of Sciences), T. Mazeh (Tel Aviv University, Israel), M. Pätzold (Köln University, Germany), and J. Schneider (LUTH, Observatoire de Paris-Meudon, France).
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[1] Nous observons exactement le même phénomène dans notre Système Solaire quand Mercure ou Vénus transitent devant le disque solaire, comme ce fut par exemple le cas pour Vénus le 8 juin 2004 (cf. communiqué de presse : ESO PR 03/04). Par le passé, de tels événements étaient utilisés pour calculer la distance Terre-Soleil et ont eu des implications extrêmement utiles pour l’astrophysique et la mécanique céleste.
[2] Gliese 581e, aussi découverte grâce à HARPS, a une masse estimée au minimum à 2 masses terrestres (voir ESO 15/09) mais la géométrie exacte de son orbite n’étant pas déterminée, il est impossible de connaître sa véritable masse. Dans le cas de CoRoT-7b, vu que le transit de la planète a été observé, la géométrie de l’orbite est bien déterminée, ce qui a permis aux astronomes de mesurer précisément sa masse.