jeudi 11 mars 2021
Trois semaines après l’atterrissage remarqué du rover Perseverance, l’instrument SuperCam vient d’achever sa phase de tests techniques. Toutes les fonctionnalités sont opérationnelles, y compris celles du spectrographe infrarouge réalisé au LESIA. La mission scientifique peut commencer.
Le rover Perseverance de la NASA a atterri dans le cratère Jezero le 18 février 2021. Cette phase critique de la mission Mars2020, appelée EDL (Entry Descent and Landing), s’est déroulée nominalement, le point d’atterrissage se situant à seulement 1 km du centre de la zone d’incertitude mesurant environ 8 km de rayon. Diffusés par la NASA, les images, les films et les sons de cet évènement ont conquis le monde entier
Crédit image : NASA/JPL-Caltech/LANL/CNES/CNRS
La partie la plus emblématique de ce rover qui donne à Perseverance cette apparence particulière avec une forme d’oeil, n’est autre que l’instrument franco-americano-espagnol, SuperCam, une sorte de “couteau suisse” permettant d’analyser à distance le sol et les roches de Mars.
SuperCam est constitué de trois parties : le Mast Unit (la “tête”), le Body Unit logé dans le corps du rover, et les cibles de calibration situées sur le dos du rover.
Réalisé au sein d’un consortium scientifique international, sous la responsabilité du Los Alamos National Laboratory (LANL) et de l’Institut de Recherche en Astrophysique et en Planétologie (IRAP, Observatoire Midi Pyrénées), cet ensemble correspond respectivement aux contributions française, américaine et espagnole.
L’instrument regroupe trois techniques d’analyse par spectroscopie : deux d’entre elles utilisent le laser : la technique LIBS et la technique Raman, et la spectroscopie de réflectance infrarouge observe le flux solaire diffusé par les roches. Les trois techniques partagent le même télescope (le fameux “oeil” du rover).
Le spectroscope infrarouge a été conçu par le LESIA à l’Observatoire de Paris - PSL, en collaboration avec le LATMOS. C’est le premier spectroscope proche infrarouge à fouler le sol de Mars. Sa réalisation est une prouesse : il pèse seulement 400 g.
Crédit image : Observatoire de Paris-PSL/LESIA
SuperCam est également équipé d’une caméra couleur à haute résolution et d’un microphone.
Les techniques spectroscopiques vont permettre d’analyser la composition atomique, moléculaire et minéralogique de la surface martienne, alors que le micro enregistrera le son du vent et donnera également des informations sur les propriétés mécaniques des roches qui seront pulvérisées par les lasers.
SuperCam est un instrument stratégique pour le choix des cibles à étudier, le prélèvement des échantillons, et la sélection des sites qui les accueilleront.
Crédit image : NASA/JPL-Caltech/LANL/CNES/CNRS
Depuis l’atterrissage le 18 février 2021, les ingénieurs et chercheurs ont testé les cinq fonctionnalités de SuperCam au cours des jours martiens (appelés “Sols”). Ils ont notamment visé une roche, baptisée “Máaz”, qui signifie Mars en indien Navajo.
La spectroscopie laser LIBS (Sol 12, Fig. 4) et la spectroscopie infrarouge (Sol 11, Fig. 5) ont montré qu’il s’agissait d’une roche basaltique commune sur Mars.
Crédit image : NASA/JPL-Caltech/LANL/CNES/CNRS
La technique de spectroscopie laser Raman a été testé sur une cible de calibration en diamant (Sol 13).
SuperCam a également enregistré le son du vent martien (Sol 4) et celui produit par les impacts du laser LIBS (Sol 12).
Pour chaque test, des images de contexte ont été prises par l’imageur couleur RMI, permettant de valider l’excellente qualité optique du télescope et des systèmes de focalisation automatique.
“Quasiment tout a été vérifié en 13 Sols (dont 6 Sols actifs pour le Mast Unit)” comme l’indique Pernelle Bernardi, ingénieure de recherche CNRS au LESIA, et ingénieure système de la caméra SuperCam. “L’instrument est donc pleinement fonctionnel, dans l’état où nous l’avions testé au JPL, et ses performances sont excellentes”. Le programme scientifique de Perseverance peut donc commencer avec l’objectif de répondre à une question des plus ambitieuses : Mars a t-elle abrité la vie il y a 3,5 milliards d’années lorsqu’elle était couverte d’eau liquide ?
Vidéo d’animation explicative montrant le fonctionnement de SuperCam