vendredi 16 mars 2012, par Bruno Bézard & Yann Hello
Le LESIA a participé à la réalisation de l’instrument MicrOmega embarqué sur la mission russe Phobos-Grunt d’exploration de Phobos, une des deux lunes de Mars. MicrOmega est un microscope qui devait réaliser des images spectrales d’échantillons prélevés à la surface du satellite pour en caractériser la structure et la morphologie, et cartographier leur composition minéralogique et moléculaire. La mission s’est soldée par un échec. Lancée le 9 novembre 2011, la sonde n’a pu rejoindre son orbite de transfert vers Mars et a plongé dans les couches denses de l’atmosphère terrestre le 15 janvier 2012.
Phobos est la plus grande des deux lunes de Mars, l’autre étant Déimos. De forme irrégulière, elle ne fait que 27 km dans sa plus grande dimension. Phobos orbite à seulement 6000 km au-dessus de la surface de Mars. C’est un des objets les plus sombres du système solaire, sa surface est très cratérisée et, spectroscopiquement, il ressemble comme Déimos à un astéroïde de type C (objet sombre et riche en carbone de composition similaire aux chondrites carbonées) .
L’origine des deux lunes Phobos et Déimos est encore en débat. Il pourrait s’agir d’astéroïdes capturés dans le champ de gravitation de Mars, de vestiges d’un satellite plus gros, ou alors du résultat d’un impact qui aurait donné naissance aux deux corps, un scénario analogue à celui de la formation de notre propre Lune. Comprendre l’origine de Phobos était l’objectif principal de la mission Phobos-Grunt.
Phobos, vu par la sonde Mars Reconnaissance Orbiter (Crédit : NASA/JPL-Caltech/Univ. Arizona)
Phobos-Grunt (en russe Фобос-Грунт c’est-à-dire sol de Phobos) a été lancée le 9 novembre 2011. Toutefois, les manoeuvres qui devaient la placer sur une orbite permettant son transfert vers Mars n’ont pu avoir lieu et la sonde est retombée dans l’océan Pacifique le 15 janvier 2012. Après 11 mois de voyage, la sonde aurait dû étudier pendant quelques mois Mars et ses lunes, puis se poser sur Phobos. Elle aurait alors prélevé environ 200 grammes d’échantillons du sol, les aurait déposés dans une petite capsule qui serait revenue sur Terre en 2014. Phobos-Grunt emportait aussi une charge utile qui devait fonctionner pendant environ une année à la surface et étudier notamment in situ la composition du sol du satellite.
Image de Phobos enregistrée par la sonde Mars Express le 7 mars 2010 montrant deux sites possibles d’atterrissage de la sonde Phobos-Grunt (Crédit : ESA/DLR/FU Berlin)
Phobos-Grunt était équipé d’une charge utile de plus de 20 instruments. Son objectif était d’étudier l’environnement ionisé de Mars et l’atmosphère de la planète, et surtout de caractériser, physiquement et chimiquement, la surface de Phobos. La France a participé à trois des instruments de l’atterrisseur : un chromatographe en phase gazeuse (GC), un spectromètre laser (TDLAS) et un microscope visible et infrarouge (MicrOmega).
MicrOmega-Phobos devait examiner les échantillons collectés à la surface du satellite pour en caractériser la structure et la composition à l’échelle des grains individuels. Il peut être considéré comme un prototype de l’instrument MicrOmega développé par l’IAS et le LESIA pour le rover de la mission ExoMars, lancé en 2018. Il s’agit d’un imageur hyperspectral visible et infrarouge proche qui fournit pour chaque pixel imagé d’environ 20 micromètres un spectre complet allant de 0,9 à 3,1 μm, ce qui permet d’identifier les phases carbonées et/ou hydratées éventuellement présentes. L’échantillon est éclairé en lumière monochromatique par une lampe à filament de tungstène couplée à un filtre AOTF (Acousto Optical Tunable Filter). Le détecteur, un capteur infrarouge de 512 x 256 pixels, est refroidi à environ 110 K (-160°C) par une machine cryogénique. L’instrument est contrôlé par une carte électronique dédiée qui assure aussi l’interface avec la sonde.
MicrOmega-Phobos a été développé sous la responsabilité de l’Institut d’Astrophysique Spatiale (IAS) à Orsay. Le « Principal Investigator » (PI) est Jean-Pierre Bibring. Les partenaires impliqués sont :
L’instrument a été livré et intégré à l’IKI en juillet 2011.
Le LESIA avait en charge la fourniture de la carte électronique de MicrOmega ainsi que la caractérisation du détecteur infrarouge.
La carte communique avec le rover via une interface RS485, elle est alimentée par des tensions de +5V et +15V fournies par la sonde. Elle doit assurer les fonctions suivantes :
L’électronique de proximité, comme celle développée pour MicrOmega-Exomars, comprend un ASIC, où est encapsulée toute l’électronique analogique de front, un FPGA, où est encapsulée l’électronique numérique assurant le contrôle de l’instrument, et un convertisseur analogique-numérique (ADC). La réalisation a été confiée à un sous-traitant (EREMS) qui a repris l’architecture proposée et une partie de la schématique mais avec un autre composant (ADC).
Le LESIA a d’autre part participé au choix du détecteur infrarouge en étroite collaboration avec l’IAS et pris en charge la caractérisation du modèle de vol. Les mesures ont été effectuées en juin 2011 sur un banc d’étalonnage optique développé au LESIA pour les instruments MicrOmega sur ExoMars et VIHI sur Bepi Colombo.
Nom | Responsabilité |
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Bruno Bézard | responsable scientifique |
Tristan Buey | chef de projet |
Yann Hello | architecture système |
Régis Schmidt | expertise électronique numérique |
Hassan Mir | caractérisation ASIC |
Alessandro Voltolina | équipement de test électrique |
Contact : Bruno Bézard