lundi 10 février 2020
Une récente compilation de plusieurs observations spectroscopiques de la surface du Soleil montre que le gradient de champ magnétique dans la direction verticale est de 3 Gauss par kilomètre, alors que dans la direction horizontale, il n’est que de 0,3 Gauss par km. Cela dénote un surprenant écart aux équations de Maxwell !
Véronique Bommier, directrice de recherche CNRS au LESIA, propose une solution au problème, en supposant une accumulation d’électrons dans la photosphère. Les protons, bien plus lourds, ne suivent pas, et il en résulte un champ électrique à l’intérieur du Soleil. Ce phénomène explique l’apparente contradiction des observations.
Pourquoi la météorologie solaire est beaucoup plus difficile et complexe que la météorologie terrestre, effectuée à partir de cartes et de modèles de prévision numérique ? Comme l’atmosphère du Soleil est un plasma, une matière chargée, en théorie nous devrions pouvoir utiliser les modèles de magnétohydrodynamique associés aux cartes de champ magnétique et de champ de vitesse à la surface du l’astre. Mais il semblerait que cela ne fonctionne pas très bien. Peut-être est-ce dû au fait que le champ magnétique que l’on mesure n’est pas celui que l’on croit.
L’article publié ce 6 février 2020 dans la revue Astronomy & Astrophysics par Véronique Bommier met en évidence une non-conservation du flux magnétique, ce qui suggère qu’en effet, le champ n’est pas égal à celui que l’on croit. Pour résoudre le problème, il faut supposer la présence d’une aimantation beaucoup plus importante que ce que donnent les modèles actuels du plasma de la surface solaire. L’accumulation d’électrons libres venant de l’intérieur de l’astre, où la haute température couplée à la faible masse des électrons leur fait échapper à la gravité et aux protons, pourrait expliquer cette aimantation. Un résultat qui permet d’envisager une modernisation de la prévision des éjections de matière solaire !
La matière chargée va suivre les lignes du champ magnétique. Ce que l’on observe est en en fait le champ magnétique H, et non l’induction magnétique B qui est à flux conservatif selon les équations de Maxwell, la différence entre ces deux quantités étant contenue dans l’aimantation M, selon la loi B = µ0 (H + M). Or, les interactions entre le champ et la matière sont le fait du champ magnétique H. C’est donc bien H que l’on mesure par interprétation de l’effet Zeeman du champ magnétique sur les atomes qui émettent le rayonnement observé. L’aimantation M est, quant à elle, du flux magnétique stocké et caché à l’intérieur de la matière elle-même. Cependant, c’est l’induction B qui gouverne les effets induits par le champ sur les mouvements de matière (la magnéto-hydrodynamique). Jusqu’à présent, on pensait que c’était B que l’on mesurait.
Véronique Bommier a conduit de nombreuses observations avec le télescope solaire français THEMIS, construit par le CNRS sur le site européen d’Izaña (île de Tenerife, Canaries, Espagne). Ces nombreuses observations lui ont révélé le phénomène décrit dans cette étude.