Institut national de recherche scientifique français Univerité Pierre et Marie Curie Université Paris Diderot - Paris 7

La comète 67P/ Churyumov-Gerasimenko est bien un objet binaire !

jeudi 30 septembre 2021

Les résultats d’une nouvelle étude menée par des chercheurs du LESIA sur la mission spatiale Rosetta renforcent l’hypothèse que la comète 67P/Churyumov-Gerasimenko est un corps binaire formé par la collision à faible vitesse de deux objets distincts pendant les toutes premières phases de formation du Système solaire. Ces résultats sont publiés dans la revue Astronomy & Astrophysics le 22 septembre 2021.

La comète 67P/Churyumov-Gerasimenko
La comète 67P/Churyumov-Gerasimenko

Cette image unique de la caméra de navigation de Rosetta a été prise à une distance de 85,7 km du centre de la comète 67P/Churyumov-Gerasimenko le 14 mars 2015.
© ESA/Rosetta/NAVCAM

Les chercheurs continuent l’analyse de l’extraordinaire moisson des données de la mission spatiale Rosetta, qui était la pierre angulaire du programme d’exploration spatiale de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) dédiée aux petits corps. Rosetta a observé la comète 67P/Churyumov-Gerasimenko (notée ci-après 67P) durant environ 2 ans, permettant d’étudier pour la première fois l’évolution de la surface d’un noyau cométaire.

Une nouvelle étude menée par des chercheurs du LESIA porte sur l’analyse détaillée de la géomorphologie, des changements de surface, et de la caractérisation de la glace d’eau exposée sur la région Wosret, localisée sur le petit lobe de la comète. Cette région, comme d’autres de l’hémisphère sud, est une de plus actives et des plus érodées, car illuminée pendant le passage du périhélie quand le flux solaire est le plus intense.

Malgré le fait que Wosret est très active, avec plus de 40 sources d’activités cométaire identifiées, très peu de changements de surface ont été identifiés : une cavité longue d’environ 30 m et profonde de 6 m, et l’amincissement de la couche de poussière d’environ un mètre sur une surface limitée, pour une perte de masse totale estimée à 1.2 millions de Kg. La glace d’eau exposée à la surface est très limitée, et observée sur des surfaces de moins de 2 m2.

Par contre, beaucoup de changements morphologiques ont été observés sur des régions du grand lobe de la comète (Anhur et Khonsu) soumises aux mêmes conditions de forte illumination que Wosret et aussi fortement actives, pour des pertes de masse allant de 50 à 170 millions de Kg, ainsi qu’une plus forte abondance de givre et de glace d’eau (pour les détails voir Fornasier et al., 2019, Astronomy & Astrophysics, Volume 630, id.A13 ; Hasselmann et al. 2019, Astronomy & Astrophysics, Volume 630, id.A8, https://u-paris.fr/la-comete-tchouri-devoilee-par-la-mission-rosetta/).

A gauche : l’hémisphère sud de la comète 67P avec indication des noms de régions. Wosret occupe la plupart de l’hémisphère sud du petit lobe. Abydos, qui se trouve dans la région de Wosret, est le site d’atterrissage final de l’atterrisseur Philae.
A droite : image en couleurs RGB issue de l’instrument OSIRIS, montrant Wosret et Anhur. On remarque beaucoup d’endroits brillants et spectralement bleus associés à de la glace d’eau exposée en surface sur Anhur, alors qu’il y en a très peu sur Wosret. Les deux régions sont très actives, érodées, et exposées au même flux solaire.

La comparaison entre des régions des deux lobes soumises à des flux solaires intenses et exposant les couches les plus primordiales et les moins altérées de la comète, a permis de mettre en évidence que le matériel du petit lobe de la comète a des propriétés physiques et mécaniques différentes par rapport à celui constituant le gros lobe. Il est notamment plus consolidé, moins fragile et dépourvue en matière volatile, au moins pour les couches le plus superficielles.

Ces résultats renforcent l’hypothèse, formulée sur la base de l’étude de la stratification du noyau cométaire par Massironi et al., (2015, Nature, 526, 402), que la comète 67P est un corps binaire formé par la collision à faible vitesse de deux objets distincts pendant les toutes premières phases de formation du Système solaire.

Référence

S. Fornasier, J. Bourdelle de Micas, P. H. Hasselmann, H. V. Hoang, M. A. Barucci and H. Sierks. Small lobe of comet 67P : Characterization of the Wosret region with ROSETTA-OSIRIS. Astronomy & Astrophysics 653, A132, 14p.
Publié le 22 septembre 2021
DOI : https://doi.org/10.1051/0004-6361/202141014
Open access : https://www.aanda.org/articles/aa/pdf/2021/09/aa41014-21.pdf

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