mercredi 21 septembre 2016, par Florence Henry, Stéphane Erard
Lors du passage au périhélie de la comète 1P/Halley en 1986, de nombreuses sondes spatiales ont été conçues pour aller étudier de près cette comète : les 2 sondes soviétiques Vega 1 et 2, les sondes japonaises Suisei et Sakigake, et la sonde européenne Giotto.
L’une des nombreuses contributions françaises aux missions soviétiques était le spectromètre infrarouge IKS (IKS étant les initiales de « spectromètre IR » en russe) réalisé par le LESIA (ex DESPA), le LPSP (devenu IAS depuis) avec des contributions d’autres laboratoires. Cet instrument était composé de deux canaux spectrométriques à 2,5 – 5 µm et 6 – 12 µm et d’un canal imageur (appelé « voie image » sans pour autant fournir des images) dont l’objectif était de déterminer les dimensions, la température et l’émissivité du noyau. Les détecteurs infrarouges étaient refroidis par un dispositif de détente de gaz.
Les sondes spatiales Vega volèrent d’abord vers Vénus en 1985 où elles déposèrent des atterrisseurs et des ballons d’exploration. Elles se sont ensuite dirigées vers la comète 1P/Halley qui se rapprochait du Soleil le long de son orbite de 76 années. Elles étaient les premières sondes spatiales à atteindre Halley, parmi une flotte de vaisseaux spatiaux voguant en direction de la comète lors de son apparition de 1986 ; elles ont été suivies par Suisei / Planet-A, Sakigake et enfin Giotto. En raison d’une défaillance du dispositif de refroidissement sur Vega-2, seul le modèle IKS à bord de Vega-1 fut capable d’acquérir des données de la comète de Halley.
IKS était monté sur une plateforme de pointage avec l’instrument français TKS (spectromètre UV, visible et proche infrarouge réalisé par l’observatoire de Besançon) et la caméra russe TVS, à laquelle avaient contribué le LAM (ex LAS à Marseille) et le LATMOS (ex Service d’Aéronomie).
IKS = Infrared spectrometer ; TKS = Three-channel spectrometer ; TVS = Television camera (Crédits CNES)
Dans la bande 2,5 - 5 µm, les spectres ont révélé la présence des molécules H2O, CO2, CO et même H2CO et OCS. Une intense bande d’émission à 3 µm liée à la vibration de la liaison C-H dans des molécules d’hydrocarbures complexes a été détectée, sans que les molécules soient formellement identifiées. Celles-ci pourraient être des PAH (hydrocarbures aromatiques polycycliques) ou des petits grains carbonés. Dans la gamme 6 - 12 µm, une large bande est attribuée à la présence de silicates, avec une signature proche de celle de l’olivine.
Les observations de Halley en 1986 ont globalement confirmé le modèle de la "boule de neige sale" décrivant les noyaux cométaires (Whipple 1950). Outre la détection des hydrocarbures, IKS a fourni une première indication de l’importance de la fraction minérale dans ces objets. Celle-ci a été confirmée depuis par l’analyse des grains de la comète Wild-2 collectés par la mission Stardust (2006). La présence de ces matériaux formés à haute température indique que les mécanismes de mélange dans la nébuleuse primitive sont plus effficaces qu’on ne le pensait.
Spectre de raies d’émission dans le domaine 2,5-5 µm obtenu par IKS lors du survol de la comète de Halley - Crédit : CNRS
– Observatoire Virtuel : accès direct depuis le client Europlanet
– Description et accès au service de données à VO-Paris
– Données spectrales IKS au PDS "Small Bodies Node" (2011)
– Données du canal imageur d’IKS au PDS "Small Bodies Node" (2011)
– Combes et al (1988)The 2.5-12 µm spectrum of comet Halley from the IKS-VEGA experiment. Icarus 76, p. 404-436. Bibcode : 1988Icar...76..404C.
– Description des sondes Vega sur le site de l’IKI
– Description de Vega-1 au NSSDC
– Vega sur la comète de Halley, CNES
– Vega et autres missions cométaires en images
– Simulation de la rencontre de la comète de Halley par les sondes Vega
– Vidéo historique sur la rencontre de la comète de Halley
